Histoire de Montdidier

Livre I - Pièce justificative 55

par Victor de Beauvillé

Pièce justificative 55

Doléances de la paroisse d'Ayyencourt et le Monchel prés Mondidier, en Picardie.

1789.

 

En l'assemblée générale de tous les habitans de la paroisse d'Ayencourt le Monchel près Montdidier en Picardie, convoquée en vertu des ordres du roy et de M. le lieutenant particulier de la ville de Montdidier, signifiée auxdits habitans le 7 de mars présent mois par le Doux huissier au bailliage dudit Montdidier, en parlant à M. Charles François Victor Levasseur, fermier de Mrs les chanoines de Notre-Daine de Paris, seigneurs dudit Ayencourt et syndics de la municipalité de la paroisse, les doléances et très-humbles supplications détaillées ès articles suivans ont été faites pour être présentées en l'assemblée ordonnée par Sa Majesté Royale, sçavoir :

ARTICLE PREMIER.

Le roy désirant soulager son peuple dont il est le père, et lui faisant l'honneur de le consulter sur les moyens qu'il pourroit employer pour lui procurer le soulagement qu'il désire, l'assemblée des habitans d'Ayencourt et le Monchel prend la liberté de représenter à Sa Majesté qu'elle croit qu'un desdits moyens seroit de ne faire qu'une seule et même loy pour toutes les provinces du royaume, d'enjoindre aux juges de ne point s'en écarter, de répandre cette loy entre les mains des sujets comme un catéchisme l'est dans chaque diocèse pour l'observance de la religion ; que cette même loy soit enseignée dans les hautes classes des colléges, chacun s'y conformeroit alors, et cela éviteroit un nombre infini de procez qui ne viennent que de l'ignorance des loys et qui ruinent une grande partie des sujets du roy.

L'on objectera peut-être que cela est impossible, que l'on y a trouvé trop de travail et trop de difficulté.

L'assemblée croit qu'en prenant dans toutes les coutumes differentes celui des articles qui sera le plus favorable au bien du peuple pour faire cette loy générale, qu'un chacun s'empressera d'observer ladite loy, et que cela ne souffrira aucune resistance.

II.

L'assemblée désireroit aussy que le roy mit la réforme dans la manière d'administrer la justice en metant des bornes à la durée des procez, et en diminuant les formalités. Le peuple se trouvera beaucoup soulagé par les grands bailliages que la sagesse de Sa Majesté a établis ; mais si Sa Majesté ne met des bornes aux procès et n'en diminue les formalités, les procureurs abuseront encore de la confiance des plaideurs pour multiplier les incidents qui allongent les procez et les rendent ruineux. L'assemblée désireroit que Sa Majesté ordonnât que tous procez fondés sur titre fût jugé en deux ou trois audiences, s'il ne peut l'être plus tôt.

Que la première audience ne se tînt pour ces sortes de procez que trois mois après l'assignation donnée pour donner à la partie adverse le temps de recouvrer ses titres, et, au cas que l'adverse partie demande un plus long delai, qu'il lui soit accordé par le juge sur une simple requête. Que tout procez par expert nommé d'office soit jugé en dernier ressort après le rapport des deux ou du troisième expert à la première audience.

Que les huissiers ne puissent donner assignation valide qu'en présence de deux témoins de la paroisse, et pour les habitations isolées, au défaut de témoins, qu'au syndic de la municipalité, qui la remettra à la partie assignée, aussy en présence de témoins ; par ce moyen l'on ne pourra plus souffler les exploits, comme il arrive souvent.

III.

Il seroit aussy à desirer, si cela étoit possible, qu'il n'y eût qu'un poids et qu'une mesure pour tout le royaume.

IV.

Le sel étant une denrée de la première nécessité pour le peuple de la campagne, dont la nourriture principale et presque unique pour la pluspart consiste en potage, est d'une si grande cherté que souvent les manouvriers, qui forment le plus grand nombre, n'ont pas le moyen de se le procurer ; le remède à ce mal seroit de supprimer les gabelles.

V.

La multiplicité des droits d'aydes, joints à la taille, capitation, et autres impositions que l'on perçoit dessus les vignes comme sur les autres biens, les frais de culture desdites vignes, les engrais et échalas, emportent plus que le produit des vignes dans le plus grand nombre des années, et réduit la plus grande partie des vignerons, qui n'ont point d'autre ressource pour vivre, à la plus affreuse misère, et les oblige de mendier leur pain pendant presque toute l'année.

Les mêmes droits d'aydes mettent aussy des entraves au commerce, ruinent les artisans dont l'état est sujet auxdits droits, et les commis tiennent le peuple, par les procez injustes qu'ils font souvent, dans le plus dur esclavage, sous le poids duquel toutes les provinces en régie gémissent depuis un temps infini.

L'on paye dans le département de la ville de Montdidier le droit de quatrième, tandis que dans les autres départemens l'on ne paye que le droit de huitième ; l'on ne sçait pourquoy cette élection paye le double des autres.

Sa Majesté soulageroit infiniment son peuple si elle pouvoit supprimer les droits des aydes, et est très-humblement suppliée de ne mettre aucun impôt sur tout ce qui est nécessaire à la vie, comme vin, viande, boisson et autre nourriture, et de n'en mettre que sur les choses de luxe qui ruinent les familles, comme habillemens de soye, gazes, rubans et les denrées de friandise, comme café et autres qui sont totalement superflues, comme l'eau-de-vie, ratafias, lesquels droits seroient payés, n'ayant plus de commis, par les distillateurs pour les eaux-de-vie et ratafias, et par les manufacturiers des étoffes de soye aux collecteurs des paroisses, qui verseroient les droits dans la caisse des impositions.

VI.

Un des moyens de soulager le peuple qui est grevé de la corvée seroit de donner à chaque paroisse qui est à portée des chemins sa tâche sur le chemin le plus près de la paroisse, à raison de ce que la paroisse paye ; par ce moyen, les particuliers ramasseroient les cailloux à leur temps perdu, les laboureurs les charrieroient de même, les chemins seroient alors mieux entretenus, les chemins neufs seroient plus tôt construits, chaque paroisse seroit chargée de l'entretien pour sa partie pendant douze ans, l'agriculture serait moins interrompue ; la municipalité de chaque paroisse seroit chargée de la visite des chemins, elle en rendroit compte à l'assemblée intermédiaire ; il ne faudrait plus d'ingénieur ny picqueurs ; les chemins coûteroient moins au peuple.

VII.

Ce qui contribue à augmenter la misère du peuple, c'est la banalité des moulins, qui sont affermés un prix si excessif que les meuniers sont forcés, pour payer leurs maîtres et vivre en même temps, de prendre double et triple mouture. L'on désireroit que les banalités fussent détruites, que l'on obligeât les meuniers de recevoir le blé au poids et de rendre la farine de même, et que l'on fit diminuer le fermage des moulins. Les meuniers anciens tenoient les moulins plus de moitié moins qu'aujourd'hui ; la plupart faisoient encore banqueroute ; aujourd'hui les moulins sont loués des prix excessifs, parce que les meuniers ne risquent rien, sachant se dédommager en prenant plus que leurs droits, et en changeant souvent le bon bled pour du bled d'un prix bien inférieur, ce qui arrive journellement.

VIII.

Le bois devient d'une cherté et d'une rareté extraordinaires, qui fait que le peuple ne sait où il trouvera de quoi se chauffer et des bois pour réparer les maisons incendiées, lorsqu'il arrivera des accidents et réparer les bâtiments qui périssent de vétusté.

L'on croit qu'il seroit du bien du peuple d'arrêter la partie du luxe qui fait que les gens aisés multiplient les feux dans leurs différens appartemens, en fixant le nombre des foyers suivant leur condition.

En obligeant les seigneurs et autres propriétaires des bois de laisser, à chaque coupe qu'ils font, une quantité d'arbres de chaque âge par arpent, au lieu des seuls baliveaux qu'ils laissent aujourd'hui.

Supprimer la maîtrise des eaux et forêts, et donner l'inspection des bois à chaque municipalité des paroisses, qui rendroit compte de l'état des bois à l'assemblée intermédiaire.

IX.

Une autre source de misère pour la campagne, c'est la trop grande cherté des fermages, qui, jointe aux vingtièmes, nef d'église et presbytère, sans le pot de vin considérable à chaque bail que les fermiers font, mettent les cultivateurs dans l'impossibilité de faire travailler les manouvriers des campagnes comme autrefois, le fermier ne vivant plus aujourd'hui qu'avec le secours de son propre bien et les petits laboureurs étant obligés de quitter leurs labours, s'ils n'ont pas de bien pour les faire subsister.

X.

Les laris que l'on a permis de defricher, ainsy que bien des communes, causent aussi de la misère dans les campagnes, en ôtant aux petits ménages la facilité d'avoir des vaches qui leur procurent bien des douceurs, rendent les bêtes à cornes plus rares, le beurre plus cher pour tout le peuple, ainsi que les cuirs.

Le remède au mal seroit de défendre les défrichements, de défendre aux seigneurs de s'emparer des communes des campagnes, et d'ordonner que tous les laris que l'on a défrichés sur les montagnes depuis quinze à dix-huit ans soient laissés en friche, comme cy-devant pour la pâture des bestiaux.

XI.

Que tous les laboureurs soient obligés d'élever des bêtes à cornes et des moutons en nombre proportionné à leur labour ; que la municipalité soit chargée de cette inspection, et en rende compte à l'intermédiaire.

XII.

Qu'il soit fait défense aux personnes qui ont des vaches pleines de six, sept, huit mois et plus proches de leur terme, de les vendre aux bouchers, et défense auxdits bouchers d'acheter lesdites vaches, sous peine de 10 livres d'amende ou plus, si Sa Majesté le juge à propos, tant pour les vendeurs que pour les bouchers acheteurs, parce que les bouchers tuent plus de vaches pleines que d'autres. La viande n'en est pas aussi bonne, de l'aveu même de plusieurs bouchers. Outre cela, cet usage de tuer les vaches pleines détruit l'espèce, prive le public de l'usage du veau, et met une cherté affreuse dans les cuirs.

L'on objectera à cela que les vaches sont plus grasses quand elles sont pleines que quand elles ne le sont pas ; l'on répondra : Comment engraisse-t-on les vaches qui ne sont point pleines dans les environs de Paris ? Ou on les engraisse quand leur lait est trop vieux pour les vendre auxdits bouchers. Il n'y a qu'à les bien nourrir, comme l'on fait dans ces pays ; l'on réussira de même.

XIII.

Un grand abus qui préjudicie au peuple, c'est la liberté que l'on accorde à une foule de gens sans domicile de vendre toutes sortes de marchandises qu'ils vont porter de porte en porte dans les villes et villages, marchandises qui n'ont point la plupart les qualités qu'elles devraient avoir, et que l'on vend très-souvent au-dessus de la valeur de la bonne marchandise de même espèce, lesdits rouleurs abusant du peu de connaissance des acheteurs.

Cette liberté accordée aux marchands rouleurs qui ne payent aucun impôt, n'ayant point de domicile fixe, étant même souvent des sujets des puissances étrangères, cette formalité, dis-je, fait que les marchands établis et qui payent les impôts dus à Sa Majesté n'ont point de débit dans leurs boutiques et ne peuvent faire honneur à leurs engagements : de là viennent les protêts qui les ruinent et les obligent de faire banqueroute.

L'on croit que le rende à ce mal seroit d'obliger tous les marchands de se fixer dans les villes et grosses paroisses du royaume, avec la liberté d'aller aux foires, et d'interdire tous marchands rouleurs, tous porte-balles, excepté les Savoyards pour les almanachs et les aiguilles.

L'on dira peut-être que la liberté du commerce sera par là interrompue : point du tout. Tous les étrangers seront libres de commercer dans le royaume en se fixant comme les sujets du roy, au lieu que, n'étant point fixés, ils emportent l'argent du royaume, et trompent les acheteurs avec impunité. Cette liberté attire aussi les mauvais sujets des pays étrangers, qui, ayant fait des sottises dans leurdit pays, se réfugient en France avec quelque argent pour acheter un peu de marchandise et commettent souvent des assassinats sur les chemins ; témoin les marchands de parasols, et les chaudronniers que l'on a exécutés il y a quelque temps à Senlis, et les douze chaudronniers que l'on a arrêtés dernièrement à Amiens pour vols d'églises et autres.

XIV.

L'on désireroit aussi que tous les banqueroutiers fussent recherchés jusque chez les puissances étrangères, où ils ont coutume de se refugier avec les sommes considérables qu'ils emportent après leur banqueroute, et que ceux qui ont fait banqueroute pour défaut de conduite ne puissent plus a l'avenir se rétablir dans l'état de marchand.

XV.

Que Sa Majesté ordonne de tenir la main à ce que toutes les étoffes ayent les qualités et les largeurs portées par le règlement, et que toute étoffe, de telle nature qu'elle soit, qui pêchera par la qualité et la largeur soit saisie au profit des hôpitaux, pour empêcher les fraudes des fabricants, et que la municipalité ait inspection et en fasse rapport à l'intermédiaire.

XVI.

L'on désireroit que Sa Majesté mît des bornes au luxe qui ruine beaucoup de familles en fixant les habillements des différents états, ce luxe fait tomber toutes les manufactures, et ordonnât que ceux qui porteront des habillemens au-dessus de leur état payent une amende applicable aux hôpitaux.

XVII.

Depuis longtemps la sagesse de Sa Majesté désire d'arrêter la mendicité dans le royaume sans avoir pu y parvenir, outre le soulagement que le roi accorderoit à son peuple ; s'il lui étoit possible, par les réformes énoncées aux articles cy-dessus.

Sa Majesté viendroit à bout d'empêcher la mendicité en supprimant toutes les maisons religieuses qui ne sont point dans les villes, et en prenant lesdites maisons pour établir des hôpitaux de distances en distances dans les campagnes pour y retirer tous les manouvriers desdites campagnes qui seroient trouvés, au rapport d'un médecin et chirurgien, hors d'état de travailler, soit parce qu'ils sont estropiés ou parce que leur âge ne leur permet plus de porter le poids des lourds travaux de la campagne. Les villes ont leurs hôpitaux, et les pauvres manouvriers des campagnes qui ont porté tout le poids des travaux sont abandonnés et obligés à la fin de leurs jours de mendier ; ce sont eux cependant qui sont les bras de l'État, et ce sont eux qui composent cette multitude de mendiants. Pour éviter le reproche que l'on fait aux administrateurs des hôpitaux de s'engraisser du sang des pauvres, l'on pourroit laisser la gestion des biens de ces hôpitaux aux religieuses même, comme à l'hôpital de Montdidier, et elles rendroient compte de l'employ des revenus aux administrateurs, que l'on ne pourroit plus accuser.

XVIII.

Un autre moyen de soulager le peuple seroit de verser toutes les dixmes de chaque diocèse en une seule bourse commune, et de mettre MM. les curés en état de soulager leurs pauvres en leur donnant une portion congrue suffisante, et pour cet effet l'on désireroit que les portions congrues fussent mises à quinze cents livres pour les villages, deux mille livres pour MM. les curés des villes, huit cents livres pour MM. les vicaires des campagnes, et neuf cents livres pour ceux des villes ; d'obliger les uns et les autres de faire toutes leurs fonctions gratis ; la dixme n'étant payée par les fidèles que pour la subsistance de MM. les curés et vicaires, c'est une injustice que de leur faire payer lesdites fonctions deux fois, parce qu'il s'est introduit dans l'église un abus en vertu duquel les ecclésiastiques, soit séculiers, soit réguliers, qui étoient chargés du gouvernement des paroisses, se sont emparés, en quittant lesdites paroisses, d'un bien qui n'étoit donné par les fidèles, comme il l'est encore aujourd'hui, que pour les ecclésiastiques qui leur administroient les sacremens et distribuoient le pain de la parole suivant cet axiome du droit canon : Beneficium propter officium.

Il est surprenant que nos seigneurs évesques aient autorisé cet abus en donnant des tarifs dans leurs diocèses, en vertu desquels les fidèles payoient une seconde fois les fonctions du saint ministère, parce que, les ministres anciens s'étant emparés, avec l'approbation des seigneurs évesques, des aumosnes des fidèles, les nouveaux ministres mouroient, pour ainsi dire, de faim en faisant lesdites fonctions.

Le dixme étant versée dans une bourse commune, le fermier de la dixme de chaque paroisse ayant payé la portion des curés et vicaires dont les quittances tiendroient lieu de deniers, le surplus desdits fermages des dixmes seroit porté à la bourse commune, sur laquelle l'on prendroit également de quoi entretenir les églises entières, l'on fourniroit les ornements et linges aux pauvres églises des campagnes, et l'on payeroit les magisters, qui sont aussi sur la charge des pauvres gens de campagne.

Au cas que la masse des dixmes ne soit pas suffisante dans certains diocèses, Sa Majesté seroit très-humblement suppliée de prendre de quoi rendre cette masse suffisante sur le superflu des gros bénéficiers, comme aussy de dédommager les hôpitaux, séminaires et colléges à qui l'on retireroit les dixmes pour les faire appliquer à leur usage naturel par le moyen dudit superflu des bénéficiers, ou en éteignant une quantité de chanoines et chapelains inutiles.

XIX.

L'on désireroit aussi que Sa Majesté laissât subsister les religieux dans chaque diocèse, en petit nombre de maisons de chaque ordre, les obligeant de s'appliquer à la prédication et de secourir les curés de campagne pendant leurs maladies, et que tous les religieux fussent soumis aux évesques de chaque diocèse dont ils seroient alors obligés d'observer les règlements.

XX.

Sa Majesté rendroit le plus grand service à la religion et au peuple, si elle arrêtoit le cours des mauvais livres contre la religion et contre les bonnes mœurs, et les chansons obscènes que les marchands de chansons débitent en place publique, qui gâtent l'esprit et corrompent les cœurs des jeunes gens et soufflent l'esprit de révolte contre toute autorité ; il est moralement impossible d'être fidèle à son prince quand on ne l'est pas à Dieu.

On croit que le remède à ce mal seroit d'établir des censeurs des livres ecclésiastiques et laïcs ; il y a un nombre de chanoines et de religieux que l'on pourrait charger de cette besogne pour la religion, et d'anciens magistrats, à qui l'on pourrait donner des prébendes que Sa Majesté inféoderoit, seroient chargés de la partie des livres avec les censeurs ecclésiastiques, pour qu'il ne se mette rien dans lesdits livres contre le bon ordre du gouvernement.

Alors tous libraires, imprimeurs ou colporteurs que l'on trouveroit avoir des livres non approuvés par les censeurs, seroient mis à une forte amende, et punis corporellement au cas de récidive.

XXI.

Sa Majesté seroit enfin suppliée de mettre un impôt uniforme qui soit payé par les trois ordres de l'État. Les doléances contenues ès 21 articles ci-dessus ont été faites, lues et relues en l'assemblée générale des habitants taillables de la paroisse d'Ayencourt et le Monchel près Montdidier, qui se feront toujours un devoir capital de témoigner à Sa Majesté leur fidélité et leur parfaite soumission aux décisions que Sa Majesté et son amour pour son peuple leur dicteront ; le 22 mars 1789, et ont signé.

Bien loin de détruire des paroisses, comme veulent faire des gros décimateurs abbés pour augmenter leurs revenus, l'on désireroit que Sa Majesté ordonnât que, dans les pays où les paroisses ont des écarts éloignés d'une lieue et souvent de deux des paroisses, l'on établît dans chaque hameau assez peuplé un vicaire en chef ; il est impossible qu'un curé puisse instruire comme il faut les habitants des hameaux éloignés, et il est d'expérience qu'il en meurt beaucoup sans sacrement, à cause de l'éloignement des curés.

Articles de supplément.

IerArticle.

Sa Majesté sera aussi suppliée de considérer qu'il est du bien des habitans de la campagne qu'ils possèdent quelques arpents de terre pour les aider à vivre ; en conséquence, il serait très-nécessaire de supprimer les droits qu'ont eus jusqu'à présent les seigneurs en retrait féodal de joindre à leurs domaines les terres que leurs vassaux achètent. Il y a des seigneurs, dans certains pays, qui retirent à leur table toutes les terres qui se vendent dans l'étendue de leurs seigneuries, et réduisent par là leurs vassaux à la besace : qu'on leur paye les censives, champarts et les droits seigneuriaux, cela est de justice, mais qu'ils n'ayent plus le droit de retrait féodal, qui d'ailleurs diminue le droit de contrôle, n'étant plus sujet à mutation par la réunion aux domaines desdits seigneurs.

II.

Sa Majesté seroit aussi suppliée de vouloir bien modérer le droit de contrôle, qui a été modique dans son origine et établi avec sagesse pour la sûreté des actes publics, et qui est aujourd'hui porté à un taux si considérable qu'il devient ruineux pour les familles.

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