Histoire de Montdidier

Livre II - Chapitre III - § II - Section I

par Victor de Beauvillé

Section I

Nomination des maire et échevins

Changements survenus à cet égard

Projet de réforme d'Antoine de Bertin

Requête présentée par plusieurs habitants

 

La charte de Philippe-Auguste, en conférant aux habitants le droit d'avoir un maire et des échevins, garde le silence sur le mode d'élection et sur la durée des fonctions de ces nouveaux magistrats. Le maire était-il changé tous les ans, ou nommé pour un certain nombre d'années ? C'est ce que l'on ignore. Quant aux échevins, il est certain que leur nomination n'était pas annale ; l'ordonnance de Philippe-Auguste, rendue à Pacy en 1220, ne laisse aucune incertitude à cet égard : le roi, sur la demande du maire et des habitants, leur accorde le droit de changer tous les ans d'échevins ; d'où il résulte évidemment que jusque-là les choses se passaient différemment.

« Philippus, etc., notum, etc., quod nos ad petitionem majoris et juratorum communie Montis-Desiderii, concessimus eisdem, ut de cetero removeant singulis annis scabinos communie sue et novos scabinos instituent, salvis universis aliis punctis carte communie Montis-Desiderii , quam de nobis habere noscantur. Quod ut perpetuum, etc., salvo jure nostro confirmamus. Actum Paciac. Anno Domini MCCXX regni nostri XLII mense marcio. »

L'ordonnance est très-laconique, et n'explique pas les motifs qui ont porté les habitants à faire cette demande ; on ne peut faire à cet égard que de vagues suppositions. Les formalités qui s'observaient dans les premiers temps pour l'élection des maires ne sont point connues, ce n'est qu'à partir du quinzième siècle que l'on a des données certaines sur ce sujet : il y a tout lieu de penser cependant que le mode de procéder usité au début de l'institution de la commune devait offrir beaucoup d'analogie avec celui que nous trouvons plus tard en usage, car dans les procès-verbaux de nomination il est formellement exprimé que l'on a suivi les règles pratiquées de toute ancienneté. Voici ce qui se passait.

Le lundi de Pâques, à l'issue de messe paroissiale et procession à son de cloches et grans huis ouverts, les anciens maïeurs, les échevins, les officiers de la ville et les maïeurs de bannières se rendaient à l'hôtel de ville. Le maire remettait les clefs et les sceaux de la ville qu'il avait en garde, témoignait sa reconnaissance de l'honneur qu'on lui avait fait en le plaçant à la tête de la cité, et priait l'assemblée de vouloir bien élire un autre magistrat à sa place. L'avocat de la ville remerciait, au nom des habitants, le maire dont les pouvoirs expiraient, et requérait qu'il fût procédé à la nomination de son successeur. Le procureur du roi prenait des conclusions semblables. Ces préliminaires terminés, les anciens maïeurs, les échevins, les officiers de la ville et les maïeurs de bannières, élisaient trois personnes au nombre desquelles étaient presque toujours le maire sortant, et c'était parmi ces trois personnes que le peuple devait choisir le maire. Si les individus ainsi proposés au choix de leurs concitoyens étaient présents, ils quittaient la salle haute de l'hôtel de ville et se rendaient au rez-de-chaussée, dans la pièce où se faisait l'élection. Le greffier de la mairie, accompagné du procureur de la ville, descendait avec les candidats, et inscrivait leurs noms sur une feuille de papier ; les habitants passaient chacun à son tour par une porte, et au passage ils indiquaient celui des trois qui leur convenait davantage ; le greffier faisait une raie sous le nom de celui pour lequel on optait, et le candidat qui avait obtenu le plus grand nombre de suffrages était proclamé maïeur, comme le plus idoine et suffisant.

C'était le suffrage universel et le vote à deux degrés, réclamé si vivement de nos jours par plusieurs publicistes éminents : seulement on le pratiquait d'une manière différente de celle que l'on propose, et plus en rapport avec l'état des esprits. Ce n'étaient pas, comme on le voudrait aujourd'hui, les électeurs primaires qui nommaient des délégués chargés de choisir, par un second scrutin, les mandataires du pays : les échevins, les officiers de la ville et les maires de bannières, c'est-à-dire la portion la plus intelligente de la commune, commençaient par voter, et le peuple n'avait plus qu'à choisir dans ce premier choix. Ce système était très-sensé : c'est, en effet, à la tête et non aux membres de donner l'impulsion ; avec cette manière d'opérer, il y avait peu de mauvaises nominations à craindre, car les échevins et ceux qui prenaient part au premier vote ne donnaient leurs voix qu'à des personnes capables dé diriger les affaires de la cité. Si le droit de vote était restreint, il était du moins, autant que possible, à l'abri de l'erreur.

Cependant il éclatait quelquefois des révolutions dans l'administration municipale, et le peuple, ressaisissant son droit de souveraineté, se choisissait un maire en dehors des trois personnes désignées : Pierre Petit en 1645, François de la Morlière en 1674, furent élus de la sorte. Le jour et le lendemain de la nomination du maïeur, on montait la garde aux portes de la ville ; l'omnipotence populaire ne voulait être inquiétée par aucune manifestation extérieure ; le peuple prétendait être maître chez lui et librement se donner un chef. Depuis la création du bailliage (1506), la présidence de l'assemblée électorale fut ordinairement déférée au lieutenant général ; mais c'était un acte de courtoisie plutôt qu'une obligation : car, à son défaut, ou quand on avait à se plaindre de lui, un ancien échevin ou un ancien maïeur présidait la réunion, comme cela avait lieu dans le passé. Lorsque le gouverneur général de Péronne, Montdidier et Roye, se trouvait dans nos murs, cet honneur lui revenait de droit.

Si le nouveau maïeur n'était pas présent au moment de l'élection, le greffier et trois sergents de ville allaient à son domicile lui annoncer la dignité dont il venait d'être investi, et le ramenaient en cérémonie à la mairie ; là, le nouvel élu, au son de la cloche, en présence des échevins et de tous les habitants, s'avançait sur le parquet ou balcon dressé devant l'hôtel de ville, et déclarait accepter ou refuser ses nouvelles fonctions. L'avocat de la ville demandait à haute voix si personne ne contestait l'élection : ces formalités remplies, le maire jurait devant le président de l'assemblée de bien et fidèlement servir le roi et le public ; quelquefois le maire prêtait serment entre les mains du gouverneur particulier ; puis on lui remettait, comme marque de son autorité, les clefs des portes de la ville, celles de la mairie et le sceau de la commune : les habitants juraient ensuite de lui obéir en toutes choses licites et raisonnables.

Après l'élection, un repas réunissait le maïeur et les échevins. On lit dans un extrait de compte de 1401 : « Despens faits le lundi ensuivant après la création du maïeur, LXXVI sols. — Despens faits le lendemain après que l'on a eu fait les officiers de la ville, XII sols. » En 1481, la ville accorda 54 sols à Jean Cailleu, pour couvrir les frais qu'avait entraînés sa nomination ; en 1499, Richard Trouvain et les dix-neuf échevins qui participaient avec lui à l'administration municipale se rendirent, après son élection, à l'hôtel de la Couronne, et y dépensèrent 40 sols ; cet usage subsista jusqu'en 1609 ; dans le dix-septième siècle, la dépense était de 8 livres. Le lendemain de son entrée en charge, le maïeur nommait les échevins, les officiers de la ville et les maires de bannières. Les échevins faisaient serment de conseiller et ayder aux affaires de la ville à leur possible, et de garder le secret sans révéler, aux peines d'estre privé et d'amende. Ils devaient se rendre à la mairie chaque fois que leurs fonctions les y appelaient, sous peine de 20 sols d'amende.

Le nombre des échevins était indéterminé. Il s'éleva jusqu'à vingt-deux, ce qui était tout à fait hors de proportion avec les besoins de l'administration. On se faisait de leur nomination un moyen de popularité ; comme le maire les choisissait, plus il satisfaisait d'amours-propres, plus il se créait de partisans. Ce chiffre de vingt-deux échevins ne paraît qu'une seule fois, en 1496 ; mais on en voit souvent vingt, seize, douze : ce dernier nombre était le plus fréquent ; on descendait encore quelquefois jusqu'à quatre. Cette mobilité donna lieu à des réclamations qui restèrent longtemps sans résultat.

Les officiers que le maïeur nommait le lendemain de son élection, étaient : le procureur, l'avocat, le greffier, et l'argentier de la ville, qui concouraient l'année suivante, avec les échevins et les maires de bannières, à dresser la liste des candidats parmi lesquels le peuple devait choisir le nouveau maire. Les fonctions de greffier étaient plus considérées qu'elles ne le sont à présent ; Jean de Baillon, qui signa en cette qualité la sentence de mort prononcée
en 1503 contre Jean Charlot, avait été argentier en 1492, 1493 et 1494 ; il fut greffier de 1495 à 1509 ; maïeur en 1510 et 1511 ; garde du scel royal jusqu'à son décès, arrivé le 14 mars 1530. Jean de Baillon était greffier de la ville lorsqu'il fut envoyé à Laon en 1496, comme député du tiers état, pour ratifier les articles du traité conclu à Étaples entre les rois de France et d'Angleterre. Jusqu'en 1509, le greffe avait été donné par le maire à qui bon lui semblait ; le greffier recevait de la ville 6 livres tournois. Depuis 1509, au contraire, le greffe devint un objet de revenu pour la commune, on le mit en adjudication, et le produit de sa vente grossit les recettes municipales. Sous Louis XIII , les fonctions de greffier et de procureur de la ville furent érigées en charge et rendues héréditaires. L'argentier rendait ses comptes le jour du jeudi saint ou la veille de Pâques ; anciennement cette formalité était suivie d'un banquet : Dépenses faites le 22 mars 1401, après que l'on a rendu les comptes de la ville... vi liv. Indépendamment des officiers que nous venons de citer, il y en avait de subalternes dont la nomination appartenait également au maïeur ; c'étaient : le sergent à masse, qui, par une disposition spéciale, devait être marié ; les sergents à verge ; le voyer ; le garde de l'horloge ; le priseur des biens ; les portiers de la ville ; le maître des hautes-œuvres ; le porcher ; le vacher ; les cerquemaneurs ; les mesureurs de terre et les jaugeurs de vins.

Les maires de bannières étaient au nombre de douze : maire des bourgeois ou oiseux, comme l'on disait au quinzième siècle, huisseux, dans le siècle précédent ; maire des bouchers ; des parmentiers ; des cordonniers ; des taverniers ; des tonneliers ; des pareurs de draps ; des fèvres ; des tisserands ; des boulangers ; des drapiers ; des manouvriers. La nomination des maires de bannières fut sujette à variations : ils furent élus tantôt par le maïeur, tantôt par les membres de la corporation qu'ils représentaient ; ils jouaient un rôle important dans les affaires de la cité, puisqu'ils participaient à l'élection préparatoire du maïeur.

Tant qu'il n'y eut aucun corps de justice et que l'autorité fut concentrée entre les mains du maïeur et des échevins, l'ordre de choses que nous avons exposé subsista sans difficulté. Mais lorsque les juridictions du grenier à sel, de l'élection et du bailliage eurent été établies, les imperfections de ce système électoral se manifestèrent promptement. Les corps judiciaires et les corporations qui s'y rattachaient, n'ayant pas de maires de bannières comme les marchands et les artisans, ne pouvaient prendre une part directe à la nomination des trois candidats désignés pour remplir la première fonction municipale ; ils restaient perdus dans la classe des bourgeois. Cette exclusion donna naissance à de grandes contestations.

Plus habiles que les individus représentés par les maires de bannières, les gens de justice ne tardèrent point, malgré le désavantage de leur position, à les dominer et à accaparer les places de maïeur et d'échevins. Des plaintes se firent entendre. Pour mettre des bornes à l'ambition des hommes de loi, et faciliter aux gens d'état l'exercice du pouvoir municipal qui souffrait de l'invasion de leurs rivaux, Henri II défendit, au mois d'octobre 1547, sous peine d'amende et de privation d'emploi, de choisir, pour remplir les places de maire ou d'échevins, les officiers appartenant à des cours souveraines ou à des juridictions ordinaires, ainsi que les avocats et procureurs près les mêmes siéges, recommandant de nommer de préférence des bourgeois ou des notables marchands : « qui ont cognoissance, soing et cure des deniers, et qui ne sont si ordinairement occupez et detenus en autres affaires, que nos officiers et ministres de justice ; lesquels outre qu'ils ont leur vocation ordinaire au fait de la justice, n'ont telle cognoissance et expérience au fait et maniement des deniers, et à les bien mesnager et dispenser que lesdits bourgeois et marchands. » Mais cet édit du roi fut violé peu d'années après par la nomination, en 1553, de Henri de Moranviller, receveur des aides, à la place de maïeur ; il fut même continué l'année suivante par dispense spéciale du roi, donnée à Ferrières, en considération du bon devoir qu'il a fait en l'exercice de cette charge.

Jean Tandoufle, marchand drapier, lui ayant succédé en 1555, les gens de robe revinrent à la charge, et, colorant leur ambition d'un prétexte spécieux, prétendirent qu'il fallait nommer aux fonctions de maire d'autres personnes que des marchands, afin qu'elles fussent capables de rendre la justice. Il y avait quelque chose de vrai dans cette allégation ; mais, une fois engagée sur ce terrain, la discussion ne pouvait finir de sitôt. En 1558, sur la plaidoirie de Jean Coullet, avocat du roi, on décida que le maïeur serait tenu de prendre pour échevins autant de gens de justice que de marchands. Cet arrangement, qui ne donnait satisfaction complète à aucun parti, les mécontenta tous les deux. L'année suivante, Jean Tandoufle étant encore sur les rangs pour être maïeur, une nouvelle tempête s'éleva : le procureur du roi, Jean de Hennegrave, fulmina un réquisitoire violent contre les désordres qui régnaient dans l'administration de la justice municipale, par suite, disait-il, de l'incapacité des maïeurs marchands ; il se plaignit des dilapidations commises dans la distribution des aumônes destinées aux pauvres ; de l'abandon dans lequel se trouvaient les écoles instituées anciennement pour l'instruction de la jeunesse, et entièrement délaissées par la négligence des maïeur et échevins. Sa philippique, empreinte d'une exagération de langage qui ne laissait que trop voir le mécontentement d'un homme de loi piqué de voir successivement plusieurs marchands arriver aux affaires, n'eut point le succès qu'il espérait, et elle n'empêcha point Jean Tandoufle d'être réélu maïeur pour la troisième fois. Dans un acte de 1562, ce dernier prend le titre de lieutenant d'Antoine de Brouilly, seigneur de Mesviller, gouverneur de Montdidier. Les relations qu'il eut avec ce seigneur lui devinrent funestes. Antoine de Brouilly ayant embrassé la religion réformée, Jean Tandoufle suivit son exemple, et fut persécuté comme lui ; sa mort fut horrible : il fut brûlé vif avec deux de ses enfants dans une maison de Maresmontiers, où il s'était retiré, par suite d'une ordonnance qui enjoignait aux protestants de quitter la ville.

Pierre de Baillon, procureur du roi sur le fait des aides, ayant été nommé maïeur en 1567, les marchands voulurent à leur tour s'opposer à son élection, se fondant sur l'édit de 1547 ; mais ils ne purent y parvenir : de là des tiraillements, des luttes continuelles. Afin d'y remédier, Antoine de Bertin, lieutenant général au bailliage, fit, en 1575, un règlement qui conférait aux juges, officiers du roi, tant ordinaires qu'extraordinaires, aux syndics des avocats, des procureurs, des notaires et des sergents royaux, le droit de concourir à la nomination des candidats aux fonctions de maire. Le maïeur devait être nommé pour un an, les échevins pour deux ans ; ils ne pouvaient être réélus que six ans après leur sortie de charge ; le nombre des échevins était restreint à huit. C'était un véritable coup d'État. Un simple lieutenant général se permettre de tracer à une ville sa règle de conduite ! oser attenter aux libertés communales ! Jamais rien de pareil ne s'était vu ; aussi le règlement d'Antoine de Bertin souleva-t-il des réclamations universelles. Bien que l'on fût en pleine guerre de religion, catholiques et protestants firent un instant trêve à leur haine commune pour ne s'occuper que de cette grave question. On déféra l'affaire au parlement, qui annula, par arrêt du 5 décembre 1575, l'ordonnance du lieutenant général, et prescrivit de suivre les formes usitées anciennement pour l'élection des maires et des échevins.

Le projet d'Antoine de Bertin fut repris quelques années après par les officiers royaux et par plusieurs des principaux habitants affectionnés pour le bien public de la ville de Montdidier. Le 2 avril 1584, jour de la nomination du maïeur, le prévôt Romain Pasquier ; Avril ; Jean de Baillon, conseiller au bailliage ; Surluré ; le Clercq, conseiller en l'élection ; Antoine Cauvel, contrôleur du domaine du roi ; de la Villette, avocat du roi en l'élection ; Dumont ; Lendormy, conseiller en l'élection ; P. le Maire, conseiller au grenier à sel ; A. Bosquillon ; le Caron, procureur au bailliage ; de Vuatignies, notaire ; F. Grandvallet ; le Caron ; Vuyon, président en l'élection ; Martinot ; Hennoque et Florent Varon, présentèrent une requête contenant leurs remontrances sur l'administration municipale. Ils insistaient pour que la reddition du compte des deniers communaux eût lieu devant le maire entrant en charge, et non en présence du maire sortant ; ce dernier ayant disposé des deniers, son contrôle devait nécessairement être illusoire.

Les signataires de la requête voulaient que, lorsque le maïeur projetait une dépense de plus de 100 livres, il fût tenu de convoquer une réunion de huit ou dix notables pour délibérer sur l'emploi de ces fonds ; ils demandaient que le maïeur, qui était nommé gratuitement par le peuple, rendît la justice gratuitement ou se contentât d'un salaire modéré ; qu'il fût annal, sans pouvoir être continué ; que les inventaires et informations fussent faits par les sergents de la ville ; que le greffier de la mairie fût contraint d'observer l'ordonnance et la taxe du tableau ; que la police fût exécutée à l'égard des hôtelliers, cabaretiers et revendeurs ; que le nombre des échevins fût réduit à quatre ou à six, qui seraient changés tous les ans ou tous les deux ans et nommés par le peuple.

La multiplicité et la nature des réclamations indiquent assez que de graves abus s'étaient glissés dans la mairie. Les pétitionnaires avaient aussi pensé à eux, et « attendu, » disaient-ils à la fin de leur requête, « que l'universalité des habitants est composée de gens de justice qui n'ont aucune voix élective à la création du maïeur, tous les habitants seront divisés par compagnies et confrairies, et chacune d'elles, par son syndic, aura voix élective à la nomination du maïeur avec les échevins et maires de bannière. » Ces demandes étaient raisonnables ; mais il n'est pas facile de triompher d'usages invétérés. L'adoption des changements proposés aurait eu pour effet de diminuer le crédit des maires de bannières ; aussi la pétition fut-elle fort mal accueillie par ceux qui avaient intérêt à maintenir l'ancien ordre de choses. Le 12 avril 1584, Cosme de Bertin , avocat de la ville, se plaignit de ce que cette requête était colportée de maison en maison pour obtenir des adhésions ; il la fit saisir sur un nommé Dumont qui en était porteur, et la remit à François de Conty, seigneur de Rocquencourt, capitaine de Montdidier ; celui-ci l'envoya à Michel d'Estourmel, gouverneur général des trois villes, qui blâma les signataires d'avoir voulu introduire des nouveautés.

Cependant quelques améliorations se produisirent. En 1607, il fut décidé que le greffier de la mairie contribuerait pour moitié aux frais des procès intéressant la juridiction communale ; c'était un frein utile. Le nombre des échevins fut diminué, et réduit tantôt à quatre, tantôt à six ; au lieu d'être tous nommés directement par le maïeur, il n'y en eut plus que la moitié qui fût laissée à son choix ; l'autre moitié devait être désignée par le peuple ; ce mode mi-partie électif, mi-partie de nomination directe, ne fut pas toujours observé.

Les signataires de la requête de 1584 se plaignaient de ce que le maïeur ne rendait pas la justice gratuitement : c'était plutôt une critique des épices que les magistrats avaient l'habitude de recevoir qu'une allusion an traitement que la ville faisait au maïeur ; il était trop minime pour être l'objet d'un blâme ; ce traitement ou ces gages, comme on disait autrefois, ne montaient qu'à 16 liv. par an. Un compte de 1402 donne le détail de ce que touchaient les officiers de la ville :

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