Histoire de Montdidier

Livre III - Chapitre I - Section VI

par Victor de Beauvillé

Section VI

Liste des prieurs

Paroisse de Notre-Dame

 

LISTE DES PRIEURS.

1140. Hannon le Roux.

1146. Berenger Ier.

1160. Jean.

1165. Robert.

1179. Berenger II.

1201. Alard.

1262. Raoul. Il mourut cette même année, et fut enterré en face du maître-autel ; en 1692, on distinguait encore sur sa tombe ce reste d'inscription :

 .   .   .   .   .   .   .   .   .   .   igitur.   .   .   .
Anno bis sex centeno quinquageno duodeno
Radulphus morbis.   .   .   .   .   ut.   .   .   .   stit orbis
Qui prior in vita decessit.

Autour de la tête se trouvaient ces mots : Memento judicii mei, sic enim...

1268. N...... Le nom de ce prieur, décédé le 31 décembre, est resté inconnu. Sur sa tombe, placée à côté de celle de Raoul, on lisait cette inscription :

 .   .   .   .   .   .   .   .   .   .   .   .   oIlicitus
Erat ut vir virtute præditus, orate pro eo.
Laus tibi sit Christe, cui servivit prior iste,
Anno centeno bis sex deciesque seno
Bis quater, valde pins fecimus exequias.
Festo Silvestri migravit mense decembri.

Il était représenté en habit religieux ; autour de la tète était écrit : Memento judicii mei, sic enim exit et tuum ..... te judicium para justiliam tibi.

1301. Guy.

1357. Jacques Donast.

1362. Aimeri.

1378. Bérard de Croiste.

1390. Alphonse de Bonneville. Avant d'être prieur, il avait été prévôt du couvent ; il mourut le 20 novembre 1401.

1401. Pierre Robant, nommé le 15 janvier 1401 ; de son temps le prieuré valait 1,200 livres.

1448. Jean de Chessoy.

1486. Adrien de Hénencourt, premier prieur commendataire, fonda, pour le repos de son âme, quatre services que l'on devait dire le mercredi des Quatre-temps, et laissa, pour l'acquit. de cette fondation, huit muids de blé à prendre sur les dîmes de Hangest.

1496. Jean Frestart.

1501. Philibert de Baudreuil. On voyait ses armes, d'argent, à trois cœurs de sable couronnés de gueules, à différents endroits de l'église et du prieuré qu'il avait fait restaurer.

1508. Simon le Gay de l'Imbertière. Il possédait le prieuré de Saint-Denis de la Chartre, où il mourut en 1525. On lisait sur sa tombe :

hic jacet ordinis cluniacensis religiosus et sancti dyonisii de carcere et montisdesiderii ambianensis diocesis prior frater simon le gay sacræ theologiæ professor, nobilis de domo et familia de l'imbertiere pictavii natus, obiit anno 1525 die 3 augusti.

Et au-dessous :

religiosi simonis gaii theologi epitaphium.

Conditur hic Gaius, cujus differre supremum
In senium jussit Parca severa diem.
Dat cœlo hunc pietas, et terris vivere fama ;
Vitam ergo huic geminam mors semel una ledit.

De son temps, les religieux, au nombre de neuf, six frères et trois novices, vivaient en commun et avaient un petit-revenu séparé de celui du prieur ; le 4 janvier 1513, ils achetèrent de leurs épargnes 4 journaux 68 verges de terre à Godainvillers, moyennant 8 liv. le journal.

1525. Jean Geoffroy ; il eut pour compétiteur Louis Benoist.

1529. Charles Hemart ; Dueanty fut son concurrent, tous les deux étaient séculiers.

1534. Claude Penicier, trésorier du cardinal de Lorraine.

1547. Étienne Poncher ; le Gallia christiana le qualifie d'archevêque de Tours ; il n'était encoee qu'évêque de Bayonne. Dans un compte du domaine de la ville de 1547, au chapitre des vins de présent, un article porte : « A monsieur de Baionne, prieur de Montdidier. »

Dans un titre du 10 mars 1550, conservé aux archives départementales de la Somme, on lit : « Étienne de Poncher, évêque de Bayonne, prieur du prieuré Notre-Dame de Montdidier. »

Étienne Poncher fut nommé archevêque de Tours en 1550, et prêta serment entre les mains de Henri H le 9 mai de cette année.

1552. Antoine de Saveuse ; il mourut le 13 avril 1590 : après sa mort plusieurs concurrents se disputèrent la possession du prieuré.

1590. Jacques le Roy, aumônier du maréchal d'A amont, qui avait été nommé prieur par le roi le 28 septembre 1790, ne put prendre possession de ce bénéfice par suite de l'état de révolte dans lequel se trouvait la ville, alors dévouée au parti de la Ligue ; un arrêt du grand conseil du 22 septembre 1594 lui enleva son titre.

1593. Pierre Peron.

1600. Pierre le Maire ; il fut dépossédé par son successeur.

1602. François de la Cour ; il eut pour compétiteur Louis Mathieu.

1614. Jean-Pierre le Caron ; il était de Montdidier et frère de l'auteur du Commentaire ;  des contestations qu'on lui suscita l'engagèrent à se démettre de son bénéfice.

1615. André de Flandres.

1619. Charles de Cohorne.

1634. Hubert Rollet.

1636. Antoine Froissart, né à Fignières. Le prieuré lui rapportait 3,000 liv., toutes charges payées ; il en afferma le revenu à son frère, et augmenta la pension des religieux de 28 liv. ; son éloge. par Jean Hollandre, de Montdidier, a été imprimé en 1613, et forme une brochure de 24. pages in-douze.

1637. Michel le Masle se démet de ce bénéfice en faveur de son neveu, se réservant 1,200 liv. de pension.

1648. Hubert le Masle céda à son successeur l'année suivante.

1649. Louis Dreux.

1654. Gilles Ménage ; il eut divers concurrents qu'il parvint à évincer, et résigna le prieuré à son successeur moyennant une pension.

1658. Charles-François de la Viéville ; il céda l'abbaye de Saint-Martial, de Limoges, et le prieuré de Montdidier à Henri de la Mothe-Houdancourt, pour l'évêché de Rennes.

1661. Henri de la Mothe-Houdancourt, grand aumônier de la reine, archevêque d'Auch.

1684. Emmanuel-Théodore de la Tour d'Auvergne, prince d'Albret.

1693. Melchior de Polignac, archevêque d'Auch.

1722. Denis le Blond : il était secrétaire du cardinal de Polignac, qui se démit du prieuré en sa faveur.

1752. Claude-Mathias-Joseph de Barral, dernier prieur commendataire, naquit à Grenoble, le 6 septembre 1714. Son père était président au parlement de cette ville. M. de Barral fut successivement vicaire général du diocèse d'Embrun, aumônier du roi et évêque de Troyes ; il fut sacré à Sens le 29 mars 1761, et se démit de son évêché en 1789, en faveur de son neveu Louis-Mathias-Joseph de Barral. Lorsque ce dernier fut transféré, en l'an xi, au siége de Meaux, M. Claude de Barral le suivit dans cette ville, où il mourut peu de temps après son arrivée, le 1er février 1803, âgé de quatre-vingt-huit ans ; M. Claude de Barral était alors tombé complètement en enfance, et ne reconnaissait pas même son neveu. Son corps fut transporté dans le Dauphiné.

Le dernier prieur claustral fut D. Jean-François Bertrand., nommé à cette place le 12 mars 1784, et continué le 8 mai 1787 ; dans l'espace d'un demi-siècle il est le second prieur qui ait été maintenu deux fois de suite dans ses fonctions. Obligé de se cacher pendant la Révolution, D. Bertrand, aussitôt la tourmente passée, revint au bercail, et, en fidèle Bénédictin, se retira à Cluny, où il termina ses jours, auprès de la maison qui avait fait la gloire de son ordre ; il mourut le 20 juin 1826, âgé de soixante-dix-sept ans. Indépendamment du prieuré de Montdidier, D. Bertrand possédait le prieuré simple et régulier de Saint-Pierre et Saint-Paul de Champvoux, diocèse de Nevers, rapportant 551 liv. 8 sols, et grevé de 195 liv. pour l'acquit de diverses charges ; il jouissait en outre de 2,000 liv. nettes de pension sur le prieuré de Notre-Darne de Monthleau-lès-Montmirail, diocèse de Soissons, dont M. de Saincton, prédicateur du roi, était titulaire.

PAROISSE DE NOTRE-DAME.

Avant de terminer ce chapitre, disons quelques mots d'une paroisse qui était incorporée à l'église du Prieuré. Les religieux étaient en droit, comme curés primitifs, d'exercer les fonctions pastorales dans toute la ville, et, en cette qualité, ils avaient seuls, avons-nous déjà dit, le pouvoir d'administrer l'extrême-onction. Ce devoir leur paraissant trop assujettissant, ils se dispensèrent de le remplir eux-mêmes, et en déléguèrent le soin à un chapelain auquel, par honneur, on donnait le titre de curé. En 1640, un ecclésiastique de la ville s'adressa directement à Rome, et obtint des lettres de provision pour cette cure ; les Bénédictins voulurent s'opposer à cette usurpation, mais un arrêt du parlement de Paris du 31 mai 1647 rejeta leur demande et maintint le nouveau titulaire, Pierre Barthélemy, dans les fonctions de curé de Notre-Dame ; c'est à partir de cette époque qu'il y eut cinq paroisses à Montdidier.

Le curé de Notre-Dame prenait rang après ceux de Saint-Pierre et du Saint-Sépulcre. Ce rang lui fut assigné par un arrêt dut 5 mai 1665, fondé sur ce que, dans le procès-verbal de la coutume de Montdidier rédigé en 1567, Michel Boucher, qualifié curé de Notre-Dame, est nommé immédiatement après les curés de Saint-Pierre et du Saint-Sépulcre. Ce titre de curé, donné improprement à Michel Boucher en 1567, fut un des motifs sur lesquels s'appuya le parlement pour confirmer l'établissement de la nouvelle cure. Dans un acte du temps, Michel Boucher est dit seulement prêtre receveur des religieux. Le compte de dépense rendu en 1457, par Jean de Chessoy, fait mention du curé du prieuré, et le confond avec les officiers et employés du couvent ; dans un compte de 1594, on voit que les gages du curé sont de 6 écus 40 sols par an, avec obligation de faire le service du prieuré ; ces curés, avant 1647, n'étaient véritablement que les serviteurs des moines.

Le curé de Notre-Dame célébrait l'office paroissial dans une petite chapelle du bas côté droit de l'église, où l'on renfermait anciennement les saintes huiles. Il était impossible qu'il ne s'élevât point quelques difficultés entre lui et les religieux, cette cure ayant pris racine chez eux sans leur consentement et s'étant attachée comme une plante parasite aux parois de leur église. Le curé voulait-il prêcher, libre à lui, mais les religieux ne lui permettaient pas de se faire entendre du haut de la chaire ; s'agissait-il de dire la messe, il ne pouvait sonner la cloche pour avertir les fidèles ; enfin on lui refusait même une place dans la sacristie pour déposer les vases et les ornements sacrés.

La justice eut bientôt à connaître de ces démêlés. Le curé intenta aux Bénédictins un procès qu'il gagna à Montdidier et à Paris ; il obtint le droit de jouir de la sacristie, de monter en chaire, de se servir de la nef pour la célébration du service paroissial, d'y exposer le corps des défunts et de faire sonner les offices, mais avec les deux petites cloches seulement ; c'était bien assez pour avertir ses paroissiens, qui, lors de l'érection de cette cure, n'étaient pas en tout au nombre de six personnes. On aurait de la peine à trouver une paroisse plus petite que ne l'était celle de Notre-Dame : elle ne se composait que du palais de justice, de la prison et de l'emplacement qui est à la suite et forme un angle sur la rue Saint-Pierre ; du côté opposé, une seule maison en dépendait : c'était la dernière avant d'arriver au palais de justice.

Comme le casuel de sa paroisse n'aurait pas empêché le curé de mourir de faim, le prieur était tenu, par l'arrêt de 1647, de lui faire 200 liv. de pension. Dans le dénombrement de l'évêché de 1302, le produit de cette cure est porté à 100 liv., et dans le pouillé du diocèse de 1648, à 700 liv., auxquelles, en 1789, venait s'ajouter un surcens de 9 liv. sur la maison habitée aujourd'hui par M. Bernard, avoué. Le titulaire devait dire douze messes par an.

Le soin de ses ouailles ne pouvait occuper longtemps le pasteur ; pour lui éviter le désœuvrement le plus complet, on le chargeait de quelque autre service : il remplissait souvent les fonctions de principal du collége, ou était attaché comme aumônier à une communauté religieuse. Le curé devait assister aux offices des moines, mais seulement les jours de fête ; il prenait rang après eux dans le chœur, et avait la qualité de curé vicaire perpétuel de la paroisse du prieuré de Notre-Dame de Montdidier. Cette paroisse fut réunie le 1er juin 1791 à celle de Saint-Pierre.

Le cimetière était à droite de l'église, à quinze mètres environ du mur d'enceinte de la prison ; on l'appelait le cimetière des Pendus, parce qu'on y enterrait ceux que la justice humaine avait frappés. D'après une tradition, il y avait autrefois sur le terrain de ce cimetière une chapelle qui servait de lieu de sépulture aux comtes de Montdidier ; les religieux auraient fait enlever leurs corps et les auraient transportés dans le chœur de l'église, pour éviter de faire des réparations à la chapelle tombée en ruine.

Il y a peu de fond à faire sur cette tradition. Si l'on excepte Raoul de Crépy, l'histoire n'a conservé le souvenir d'aucun comte de Montdidier qui soit décédé dans cette ville. Le corps de Raoul fut reporté à Saint-Arnoul ; on sait où ont été enterrés ses successeurs ; quant à ses prédécesseurs, ce ne pourrait être que d'Hilduin Ier ou d'Hilduin III qu'il serait question, car Hilduin II mourut dans son voyage en Palestine. Mais, puisqu'on ne sait pas même exactement en quelle année Hilduin Ier et Hilduin III sont morts, comment voudrait-on préciser le lieu de leur décès, et, ce qui est encore plus difficile, la place de leur sépulture ? Cette supposition de la translation du corps des comtes de Montdidier d'une chapelle particulière dans l'église du prieuré n'est appuyée sur aucun document historique : on ne dit ni quand elle s'est accomplie, ni quel est le prieur qui aurait présidé à cette cérémonie ; il faut donc se tenir en garde contre une donnée de ce genre.

L'emplacement de cette prétendue chapelle et du cimetière des Pendus, supprimé à la Révolution, a été vendu comme propriété communale par la ville, en 1849, et on y a élevé diverses constructions.

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